dimanche 11 janvier 2015

Liberté d'expression, #Charlie et malaise

L'idée, ici, n'est pas de revenir sur les événements récents de Paris. Mais simplement soulever certains points qui m'empêchent de soutenir un mouvement comme #JeSuisCharlie. Encore une fois, je ne soutient pas ici ni les tueurs, ni la tuerie. Je soulève simplement certains malaises.

La liberté d'expression
Dès le départ, on affirme que l'acte, la tuerie de Paris, est une attaque directe sur la liberté d'expression, si chère à la France. Or, comment pouvons-nous affirmer que cette liberté est belle et bien si chère, alors que la France elle-même censure des humoristes comme Dieudonné ? Il ne s'agit pas ici de cautionner son humour, ou son style d'humour, mais simplement de questionner l'idée d'une liberté d'expression à géométrie variable.



L'histoire des caricatures
Certains médias ont décidé de publier intégralement les caricatures controversées, celles représentant le prophète. Or, lors de l'incendie des locaux de Charlie Hebdo, en 2011, tous les médias s'étaient entendus pour flouter ces caricatures. Encore une fois, parle-t-on de liberté d'expression à géométrie variable ? Ou de solidarité médiatique conditionnelle ?


 #JeSuisCharlie , la pire des hypocrisies
N'est-il pas un peu bizarre de voire le maire Denis Coderre affirmer qu'il est Charlie, et qu'il prône la liberté d'expression, alors même qu'il soutient le règlement P6, brimant cette liberté à ses propres citoyens ? 
Ou encore que Régis Labeaume se pose comme un défenseur de la liberté d'expression, alors qu'il peine à l'accorder à ses opposants dans les conseils municipaux, ou aux employés de la ville de Québec dans les négociations?
Ou finalement qu'on affirme haut et fort que nous sommes tous Charlie, mais qu'il faudrait du même souffle resserrer les frontières et fermer les mosquées ? Je ressent un profond malaise.


La marche, une autre affaire
Ce dimanche, les rues de Paris se sont remplies de citoyens et autres politiciens affirmant leur support à Charlie Hebdo et à la liberté d'expression. Certes, l'idée est louable. Toutefois....
Que vient y faire Erdogan, alors même qu'il n'hésite pas à emprisonner les opposants formulant quelconque critique du pouvoir ? Et c'est sans compter les nombreux journalistes, tel que rapporté par Reporter Sans Frontière en 2012, qui y sont emprisonnés.
Que vient y faire Benjamin Netanyaou, qui n'hésite pas à exercer une censure sur les opposants aux régime militariste d'Israel ?
Que vient y faire Steven Blaney, alors que son gouvernement n'hésite pas à exercer une ingérence politique dans les recherches scientifiques?
Et, ironiquement, des partis ayant appuyé le projet de loi 78, en 2012, brimant la liberté d'association, viennent manifester, à Québec, pour la liberté d'expression, au point d'en prendre une photo. 


Voila. Alors non, nous ne sommes pas tous Charlie. Vous n'êtes pas Charlie, non plus. Laissons les proches, la famille, les amis et collègues, ainsi que le monde de la caricature satirique faire son deuil. Mais n'allez pas les embêter avec votre relativisme indécent.


Addendum 
De plus, pour avoir une idée des chefs d'État et de leur représentants, présents à la manifestation de Paris, affichant leur appui à la liberté d'expression tout en ayant des attitudes plus que douteuses à l'intérieur même de leurs frontières, je vous suggère ce lien. L'utilisateur @DanielWickham93 en a fait, sur Twitter, une liste impressionnante, qui a été mise sur Storify.